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Stéphanie Jacquet, le sacre de l’enfant du pays

Par La rédaction
02 October 2020
Présente en métropole pour mener à bien ses recherches scientifiques dans le domaine de la transmission des maladies infectieuses entre hôte et parasite, la chercheuse Stéphanie Jacquet a été reconnue par ses pairs en recevant le Prix Jeunes Talents L’Oréal-UNESCO pour les Femmes et la Science.
 
Pure âme saint-martinoise, Stéphanie est née ici et y a vécu une enfance bercée par le chant des Antilles. C’est sur les bancs d’école que son intérêt pour les sciences a pris de l’ampleur. Il suffisait de lire un de ses bulletins de notes pour constater son potentiel dans le domaine scientifique. Avec son BAC scientifique en poche à 17 ans, elle fait le choix de la métropole pour accéder aux études supérieures, direction Montpellier. 2005 signe le début d’un cursus universitaire impressionnant : licence en biologie, master spécialisé en parasitologie et thèse soutenue en décembre 2015 qui lui fera décrocher le diplôme de doctorat. Depuis 2016, ce talent de Saint-Martin passionné par les sciences de la vie est établi à Lyon où elle occupe un poste de chercheuse contractuelle de post-doctorat, étape charnière en vue de concourir pour un poste de chercheuse permanente.
 
L’enseignement attendra, au grand bonheur de la recherche
 
Partie de Saint-Martin avec la ferme intention de se diriger vers l’enseignement, un certain cours en parasitologie en décidera autrement… elle nous raconte cette révélation scientifique qui va changer sa vie :
« J’assistais à ce cours où avait été présenté l'exemple d'un parasite qui manipule son hôte. C'est une phase en deux temps avec un parasite qui a deux hôtes différents, un hôte intermédiaire pour réaliser une partie de son cycle -ici c’était la fourmi-, et un autre hôte définitif cette fois, où le parasite va finir son cycle de vie, et là c'était la vache. En gros, lorsque le parasite avait fini la première partie de son cycle de vie dans la fourmi, il devait trouver le moyen de se retrouver dans une vache. Ce moyen était de manipuler la fourmi de sorte qu'elle reste figée sur un brin d'herbe et que la vache qui broute cette herbe l'ingurgite plus facilement, se retrouvant ainsi dans la vache qui deviendrait son hôte définitif. C'est tellement malin ! J’ai été fascinée par l’extrême intelligence de ce parasite, ma curiosité était piquée comme jamais et pour en savoir plus, je devais me diriger vers cette voie-là : la recherche dans la transmission des maladies infectieuses entre hôte et parasite. »
Cette spécialité était d’autant plus chère à la scientifique que ses Antilles natales sont directement concernées par le sujet, l’enjeu est majeur et cette problématique la touche personnellement.
 
Il était une fois la vie
 
Après un 1er stage consacré au tic transmetteur de maladie à Madagascar puis un second sur la résistance des rongeurs à la peste -toujours de Madagascar-, la thèse de Stéphanie s’axe sur un moucheron comme vecteur d’un virus transmis au bétail, toujours dans l’idée d’étudier les mécanismes qui gouvernent la circulation de pathogènes entre espèces. Sans vecteur, le virus ne peut ni perdurer ni être transmis. Ce qui nous amène à aujourd’hui et aux chauves-souris.
« Les chauves-souris sont hôtes de nombreux virus, c'est malheureusement devenu de notoriété publique vu le contexte actuel, mais tout organisme peut être vecteur d’agent pathogène, l’homme compris.
La différence avec la chauve-souris, si elle est infectée, elle ne semble pas développer de symptômes contrairement à d'autres espèces de mammifères. Elle aurait donc cette folle capacité à cohabiter avec un virus sans tomber malade. Grâce à des échantillons d’ADN (*), j’étudie par leur système immunitaire qu’on appelle inné et des gènes qui ont une fonction antivirale, fonction qui va bloquer la réplication du virus. Est-ce spécifique à la chauve-souris ? La recherche nous le dira. » Fascinant.
(*) Aucune chauve-souris n’a été maltraitée pour la rédaction de cet article.
 
Prix Jeunes Talents France L’Oréal-UNESCO pour les Femmes et la Science, quésako ?
La Fondation L’Oréal récompense chaque année dans la catégorie Jeunes Talents pour les Femmes et la Science, 35 lauréates de différentes spécialités scientifiques. Parmi elles, on compte non seulement Stéphanie Jacquet mais 3 autres doctorantes ou post-doctorantes originaires des Antilles. Le processus de sélection est rigoureux : 686 candidatures sont examinées par un comité de 87 experts scientifiques, dont 109 candidates seront retenues. Un jury de 20 académiciens sélectionnera alors les lauréates finales.
« Je dédie d'ailleurs ce prix à deux femmes d’une grande bienveillance dont je suis fière d'appeler des modèles : Claire Garros, mon encadrante de thèse, et Dominique Pontier, ma responsable hiérarchique et co-encadrante actuelle, qui a été d'un grand soutien durant la phase de sélection. »
Dans un contexte pandémique mondial, la recherche scientifique est primordial et se doit d’être accessible à toutes et à tous. Si les femmes représentent aujourd’hui 28% des chercheurs, la Fondation L’Oréal s’engage au quotidien dans la valorisation des femmes scientifiques. Motivée par ce prix Jeunes Talents France L’Oréal-UNESCO pour les Femmes et la Science et fière de cette reconnaissance directe de son travail, Stéphanie Jacquet a la volonté de transmettre -en toute sécurité- sa passion à la jeunesse saint-martinoise, d’encourager voire d’inspirer les jeunes filles en particulier, à se diriger vers un parcours scientifique. La science a tout à y gagner, notre futur aussi.
 
La rédaction