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Lever de boucliers contre l’IFREMER

Par Ann Bouard
27 February 2025

Onze organismes et associations montent au créneau pour dénoncer le choix de l’institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (IFREMER) de mener une campagne de tirs sismiques dans les eaux des Antilles en pleine période de reproduction de plusieurs espèces de cétacés, dont les baleines. Une hérésie pour un organe qui, outre la collecte de données, a également pour mission la gestion durable des écosystèmes marins exploités.

Malgré les recommandations qui lui ont déjà été faites, l’IFREMER a décidé de mener une campagne de prospections sismiques, nommée GARANTI2 et opérée par le navire Atalante, dans les eaux des Petites Antilles, et notamment dans les eaux françaises du Sanctuaire Agoa des mammifères marins, du 10 mars au 12 avril. Une mission autorisée par un arrêté du préfet de la Martinique. 

Mise en danger des cétacés

Cette campagne de recherche se déroulera dans les zones côtières de la Martinique, de la Guadeloupe et des îles du Nord, pour échantillonner des roches et évaluer les risques sismiques dans la région. Pour ce faire, les scientifiques procéderont à des prélèvements de sédiments sur le fond marin, et à des enregistrements acoustiques et sismiques. Ces derniers seront effectués par le biais d’un « air gun Array », soit des tirs à air comprimé, dont le niveau sonore est bien au-delà de la tolérance des espèces sous-marines. Le niveau d’exposition maximum, recommandé par l’OFB, avant de provoquer des pertes d’audition chez les mammifères marins, est en effet de 224 dB ;  au-delà, des études scientifiques démontrent que cela provoque des modifications comportementales chez les cétacés et qu’un seuil dépassant les 230 dB induit des modifications physiologiques et peut être létal ! Les tirs prévus sont évalués à 238dB.
En mars et en avril, les baleines à bosse viennent s’accoupler et mettre bas dans toutes les Antilles, les mâles Cachalots, espèce protégée classée et vulnérable dans le monde et en danger à l’échelle des Petites Antilles (liste rouge 2021), sont également présents pour la reproduction. Il est donc inconcevable qu’on y de pratiquer à ce moment-là des tirs sismiques quels qu’ils soient.

Demande d’annulation de la mission

Les différents organismes de préservation des espèces dénoncent par ailleurs l’arrêté préfectoral portant autorisation de cette campagne, mais qui ne fait pas mention de l’obligation d’une demande « dérogation espèces protégées », alors qu’il y aura nécessairement à minima dérangement, effarouchement, mais aussi lésions temporaires ou définitives vu le niveau d’exposition sonore utilisé. La mise en place de protocoles de mitigation sous-entend bien d’ailleurs un dérangement potentiel. Or, s’il y a un risque de dérangement, une demande de DEP doit être déposée.
L’observatoire des mammifères marins de l’archipel de Guadeloupe, Megaptera, les Whale-watchers de Guadeloupe (Markus Evasion) et de Saint-Martin (Wind Adventures), les associations Mon Ecole Ma Baleine, Breach Antilles, Eleau, Assomer et ASFA demandent par conséquent l’annulation de cette campagne dont les niveaux d’expositions sonores ne sont pas acceptables dans une aire de reproduction d’espèces sensibles sanctuarisée.

Ann Bouard