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Le Festival Ecritures des Amériques a fait escale à Saint-Martin

30 November 2021
Vendredi dernier, le Festival Ecritures des Amériques se déroulait dans l’écrin de nature de la Lottery Farm. Un joli moment de respiration dans ces temps incertains et mouvementés avec une rencontre enrichissante de deux auteurs, la franco-mauricienne Caroline Laurent et le haïtien, Makenzy Orcel.
 
Invités du soir, deux écrivains, Caroline Laurent, franco-mauricienne, auteure du livre Rivage de la colère, publié en 2020 aux éditions Les Escales et Makenzy Orcel, haïtien, auteur du roman L’Empereur, publié en 2021 aux éditions Rivages. Animés par l’auteur saint-martinois Robert Romney, le débat et la discussion littéraire emmenés par ces deux auteurs ont été d’une belle richesse empreinte de leur histoire respective. Pour Caroline Laurent, son livre d’inspiration autobiographique tire son essence dans le drame historique et pourtant méconnu, celui de l’exil forcé des populations de l’île de Diego Garcia située dans l’archipel des Chagos, cet ensemble d’atolls situés dans le nord de l’Océan Indien. C’est en 1968, au moment de l’accession à l’indépendance de Maurice, après 158 ans de présence coloniale britannique, que les américains ont souhaité conserver un pied stratégique dans l’Océan Indien. Les anglais ont alors souhaité récupérer l’île de Diego Garcia pour la louer aux américains afin qu’ils y installent leur base militaire. En 1971, les Chagossiens ont alors été déportés en quelques jours vers l’île Maurice et aux Seychelles, dans l’ignorance la plus profonde de ce qui se tramait et dans des conditions abjectes et inhumaines, et dans l’indifférence générale des plus hautes instances internationales. Depuis, les chagossiens se battent pour se voir réhabilités et pouvoir retourner dans leur île ancestrale. Caroline Laurent, porteuse de cet héritage par sa mère, estime avoir un devoir de mémoire en racontant cette histoire, en « donnant une voix à ceux qui n’ont plus de voix », confiait-elle.
 
Héritage... une couleur du passé
 
Makenzy Orcel, porte en lui la charge de l’histoire d’Haïti, ancienne et contemporaine. Chacun de ses romans, pose un regard profond et fouillé sur sa ville natale, Port-au-Prince. Avec son dernier ouvrage, l’Empereur, l’auteur s’attache « aux tourments d’un homme blessé, en lutte contre toutes les formes d’oppression. Ayant commis l’irréparable, un homme attend dans sa chambre qu’on vienne le chercher. Son passé résonne en lui comme un tambour. Il repense à cette jeunesse de zombie, sous l’effroyable emprise d’un maître vaudou… ». Son héros n’a pas de nom, pas de visage… « Le vaudou, c’est l’esprit de la révolution, l’âme du pays, qui prévalait avant le retour du colon et de l’église catholique », raconte Makenzy, dont l’écriture de ce roman est pour mettre en lumière la richesse du vaudou à l’écart des aspects négatifs dont on a voulu l’étreindre.
Créé en 2000 par la romancière guadeloupéenne Maryse Condé et l’industriel martiniquais Amédée Huyghues Despointes, le Festival propose à chacune de ses éditions de riches rencontres littéraires entre des auteurs des Caraïbes, des Amériques, de l’Afrique, ou de tout autre territoire où s’invite l’écriture. Cette année, le thème « Héritage » mettait à l’honneur l’épopée d’une lignée de déracinés en déclinant « l’acceptation pleine d’un mot qui évoque les vestiges réels ou rêvés de la mémoire qui irriguent la fiction (…).
Par la voix du président Gibbs, la Collectivité de Saint-Martin qui a accueilli pour la première fois une escale de ce festival, a indiqué souhaiter à l’avenir être inscrite plus régulièrement dans l’itinérance caribéen de son programme.