Yann Quennet : un tour du monde en solitaire et une escale à Saint-Martin

Loin du cliché des grands navigateurs qui parcourent les océans sur des géants des mers bourrés d’électronique, Yann Quennet, marin autodidacte est un véritable aventurier comme on en croise parfois dans les romans les plus fous. Depuis dix ans, il fait le tour du monde en solitaire sur un bateau de 4 m, et s’est arrêté à Saint-Martin.
Dès son plus jeune âge, ce Nantais d’origine songe à faire le tour de la planète en bateau (en plus de 80 jours), influencé sans doute par la lecture de ces auteurs qui donnent envie aux enfants de découvrir le monde. Après un début de vie professionnelle purement alimentaire, notre homme prend un congé sabbatique pour réaliser son rêve de gosse, et advienne que pourra !
Il faut dire que depuis l’adolescence, il traîne sur les chantiers navals de la côte bretonne pour gagner son argent de poche tout en observant attentivement les techniques employées par les marins chevronnés qui bichonnent leurs embarcations avant de prendre la mer. En 2015, se sentant prêt à franchir le cap, Yann construit lui-même son premier mini-navire en bois et annonce à son entourage qu’il part pour la grande traversée, mais une tempête le surprend au milieu de l’Atlantique. Sauvé in extremis par un cargo, il rentre à Saint-Brieuc penaud, mais pas découragé pour autant.
Il était un petit navire
Il se remet à l’ouvrage et donne naissance à un second bateau qu’il baptise « Baluchon », et il repart sous l’œil narquois de ses amis qui ne croient pas une seconde qu’il réussira à affronter les éléments sur sa coquille de noix rudimentaire. Jugez plutôt : 4 m de long, 550 kg, 11m2 de voile sur un mât de 7 m, pas de moteur (juste une godille de secours), pas d’instruments de navigation non plus (le GPS du téléphone suffira amplement), un panneau solaire, et la pluie pour l’approvisionnement en eau claire. Il fallait oser.
C’est pourtant une réussite totale, et depuis ce jour Yann Quennet parcourt la planète au gré du vent et de ses envies. Après un premier tour complet du globe, qui a donné lieu à un livre où il raconte ses aventures (« Le tour du monde avec mon Baluchon »), il fait une courte pause et redémarre en 2019 pour un circuit sans fin qui l’emmène aux Canaries, puis aux Antilles avant de passer par Panama pour rejoindre la Polynésie, et les îles Marquises. La crise du Covid l’empêchant d’accoster en Australie, il se dirige vers la Nouvelle-Zélande puis rejoint l’île de la Réunion après une traversée épique de 77 jours non-stop.
Dès que le vent soufflera, il repartira
Sans aucun incident, sans jamais tomber malade, notre homme passe ensuite par l’Afrique du Sud, Sainte-Hélène, le Brésil et les Açores avant le retour à Saint-Brieuc. Après plus de trois ans de navigation, on pourrait penser qu’il va se calmer un peu, c’est bien mal le connaître, car il ne tient pas en place dès qu’il a le pied sur la terre ferme, et après quelques travaux de remise en état de Baluchon, le petit navire est à nouveau sur les flots histoire d’explorer encore les océans du monde.
Nous avons fait la connaissance de Yann sur le chantier naval Geminga à Marigot, où il attend l’arrivée de la belle saison pour rejoindre la côte Est du Canada en passant par Saint-Pierre- et-Miquelon, et remonter le Saint-Laurent. Son projet est de charger ensuite son frêle esquif sur le toit d’une vieille bagnole d’occasion achetée sur place, pour traverser le continent nord-américain et se remettre à l’eau sur les rives du Pacifique, afin d’aller saluer son ami Olivier de Kersauzon qui l’attend à Tahiti. D’ailleurs le célèbre navigateur n’a jamais caché son étonnement et son admiration face aux exploits de Yann, il lui a même organisé un accueil digne des arrivées du Vendée Globe un jour qu’il accostait à Papeete incognito.
Tant mieux si la route et longue
Lorsqu’on lui demande quels ont été ses plus grandes frayeurs, ou ses plus mauvais moments de navigation, il avoue ne rien avoir de sensationnel à raconter, car selon lui tout s’est toujours bien passé… une zen-attitude à tomber par terre. Quant aux plus beaux souvenirs, il faudrait sans doute y passer de nombreux jours pour les raconter tous en détail. Rassurez-vous, le deuxième tome de ses aventures est en préparation. C’est d’ailleurs Isabelle, sa compagne, qui se charge de corriger le manuscrit entre deux visites furtives du marin solitaire.
Nous avons rencontré un homme passionnant et très pudique, d’une humilité rare qui force le respect. On aurait aimé parler avec lui des heures durant, mais il est temps de lui laisser le mot de la fin en guise de leçon de vie : « Il faut toujours croire en ses rêves ».
