Production d’électricité : Saint-Martin en situation de crise
Depuis plusieurs semaines, Saint-Martin fait face à une fragilité de sa distribution électrique, incitant le Préfet Vincent Berton à établir une cellule de crise. Celle-ci se réunit tous les 15 jours avec EDF, les services de l’État, la Collectivité de Saint-Martin et des socioprofessionnels pour faire le point sur la situation. Lors d'une conférence de presse mercredi, le Préfet, en présence de la sous-préfète Marie Hildegarde Chauveau, a exposé les conditions actuelles de production et de distribution de l’électricité.
Saint-Martin dispose d'une unité de production électrique vieillissante fonctionnant au fioul, composée de trois tranches. Deux d'entre elles, en état d'obsolescence, devraient être fermées rapidement. La 1re tranche fonctionne de manière dérogatoire, car elle ne respecte pas les normes de rejets atmosphériques, tandis que la 2nd est en fin de vie. Le Préfet a annoncé la création d'une nouvelle unité de production à la biomasse liquide, plus écologique, qui sera construite à Galisbay, sur des terrains adjacents à l'usine actuelle. Si aucun accord n'est trouvé avec les propriétaires, une Déclaration d'Utilité Publique (DUP) sera envisagée.
Le 3e groupe, le plus récent, ne devrait pas poser de problème, mais EDF a découvert qu’il y avait des défauts structurels, avec des fissures sur les moteurs, ce qui fait qu’aujourd’hui que sur ces trois groupes, deux sont à l’arrêt.
Cela a conduit à un déséquilibre entre l'offre et la demande d'électricité, provoquant des délestages, obligeant EDF à faire venir des solutions en renfort sur l’île. Ainsi, 5 mégawatts (MW) supplémentaires ont été installés au sein de l’usine de production, et ensuite 4 MW ont été disséminés partout sur l’île, via 13 groupes électrogènes.
Une usine à biomasse liquide d’ici 2029-2030
Un point positif est la diminution de la pointe de consommation électrique, qui est passée de 27,4 MW en septembre à 25 MW. Le Préfet souligne que la climatisation est le principal facteur de consommation et que l'hiver pourrait réduire cette demande si les conditions météorologiques sont favorables. Cela étant, on est actuellement sur une situation d’urgence, considère le Préfet. Des moyens de production mobiles supplémentaires, totalisant 15 MW, seront installés début 2025 pour améliorer la situation.
À partir de l'été 2025, une nouvelle centrale temporaire de 34 MW sera mise en place, permettant une production plus sereine et sans rejets carbonés, en attendant la mise en service de la nouvelle usine à biomasse liquide prévue pour 2029-2030.
Le Préfet Berton insiste sur la nécessité d'une sobriété énergétique accrue, car la consommation électrique à Saint-Martin augmente de 3 à 4 % chaque année., « il y a des comportements qu’il faut faire évoluer avec plus de responsabilités, plus de sobriété, et avoir des équipements moins énergivores ». Il est également crucial de préserver l'attractivité touristique de Saint-Martin, car des coupures d'électricité pourraient dissuader les visiteurs.
Le Préfet gère une situation de crise
Bien qu'EDF doive assumer ses responsabilités de producteur et de distributeur sur le territoire, un effort collectif de sobriété énergétique est nécessaire de la part de la population. La cellule de crise se réunit régulièrement pour s'assurer que la situation est sous contrôle et pour recueillir les retours des socioprofessionnels, afin de minimiser l'impact économique sur eux.
Le coût de l'exploitation des groupes électrogènes reste inconnu pour le Préfet, qui précise que les consommateurs à Saint-Martin paient le même prix que ceux en métropole, « ce qui veut dire que la solidarité nationale s’exerce à Saint-Martin », et d’assurer que le prix payé sur le territoire est déconnecté du coût local de production de l’électricité. En effet, le prix de production à Saint-Martin est quatre fois supérieur à la moyenne nationale, mais l'État ne souhaite pas pénaliser les insulaires dépendants de ces moyens coûteux. Ainsi, il n'y aura pas de répercussions sur les factures des consommateurs concernant les surcoûts liés aux groupes électrogènes, bien que la collectivité en assume le coût via la solidarité nationale.
« Je gère une crise », considère le Préfet, et si le terme de crise semble un peu fort, « à partir du moment où l’on n’est pas certain de délivrer l’électricité aux Saint-Martinois, pour moi c’est une situation de crise ».
Le représentant de l’État fait en sorte que les investissements à faire se concrétisent, aussi il est intervenu très fortement auprès de la Collectivité pour que les choses soient faites, notamment en matière de foncier, avec la DUP, « parce qu’on ne peut pas continuer dans cette situation d’attente ».