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Amour toxique…

Par Ann Bouard
21 February 2019
Dix-huit ans de relation commune, cela se fête. C’est ce qu’ont fait SS et GM, mais la petite fête à dégénérée. Il comparaissait mercredi devant le tribunal pour coup porté sur sa compagne. Une affaire somme toute assez banale, mais qui s’est avérée beaucoup plus compliquée qu’elle n’y paraissait.

Les faits ne sont pas nouveaux car Monsieur a d’ores et déjà été condamné pour des faits similaires l’année dernière. En septembre, il lui a d’ailleurs été notifié son interdiction de séjour sur le territoire français, obligation qu'il n'a, a priori, pas respectée. Le couple est cependant séparé. Il vit chez sa mère en partie hollandaise, elle vit sur la partie française avec leurs huit enfants, âgés de sept à dix-neuf ans. Mais Madame ne travaille pas et vit grâce aux allocations familiales. SS complète les revenus, en lui reversant l’intégralité de son salaire, et veille à l’éducation des enfants.

UN RELATION CHAOTIQUE

Samedi dernier, à l’initiative de Madame, ils sortent pour fêter leur dix-huit ans de vie commune. SS, fait appel à une nounou pour garder les enfants durant deux heures, car la situation est quelque peu conflictuelle dans la fratrie. La soirée se prolonge et les boissons se succèdent. Ils ne vont rentrer que vers cinq heures du matin, aussi alcoolisés l’un que l’autre. La dispute a débuté dans la boite de nuit, quand GM accuse son compagnon de lui avoir subtilisé son téléphone. C’est l’une des versions. Une autre dit que c’est parce qu’elle lui annonçait vouloir le quitter qu’il s’est emporté. Mais, comme le souligne le magistrat qui récapitule l’affaire, il aura fallu sept heures de dégrisement avant que les gendarmes puissent interroger SS. On peut donc supposer que les souvenirs de la soirée sont un peu flous et expliquent les versions contradictoires. Mais les contradictions vont jusque dans les comportements au tribunal : il veut bénéficier du délai de droit pour différer sa défense, puis se ravise et accepte d’être jugé sur le champs. Elle veut qu’il soit jugé, mais ne veut pas qu’il soit puni pour le coup porté et qu’il soit séparé des enfants. Les regards échangés entre les deux protagonistes en disent long sur leur relation.

UNE NOUVELLE CHANCE

Le procureur, dans ce contexte particulier, dont des problèmes avec les enfants que l’on ne peut aborder, qualifie le couple de pathologique. Cependant l’infraction pour situation irrégulière sur le territoire a été selon lui mal qualifiée : né d’un père originaire de Curaçao et d’une mère native de République Dominicaine, SS a un passeport hollandais et est donc citoyen européen. 
Condamné en juin 2018 à quitter le territoire mais obligé de s’y rendre dans le cadre de sa mise à l’épreuve, SS est confronté à une situation problématique. Pour le coup porté, et tenant compte de son addiction à l’alcool et de la récidive, le procureur requiert une nouvelle peine de six mois de prison avec maintien en détention, sans interdiction de séjour ou de contact à l’issue de la peine.
L’avocate du prévenu argue quant à elle que les faits ne sont pas réellement établis, car ils le sont uniquement par la victime. Les témoins de la dispute, à la discothèque ou au domicile de GM, n’ont pas été entendus et le caractère volontaire du coup n’est pas démontré vu l’état d’ébriété de son client au moment des faits. Elle rappelle par ailleurs que lui retirer la possibilité de voir ses enfants, de travailler pour subvenir à leurs besoins en l’envoyant en prison n’est pas la solution.
Le mot de la fin revient à SS qui assure vouloir continuer à veiller sur ses enfants et voudrait même en avoir la garde exclusive car il estime que Madame ne pourra pas, seule, s’en occuper, d’autant plus si cette histoire le ramène à la case prison. Il demande pardon à sa compagne et supplie le tribunal de lui accorder une chance.
SS sera relaxé de l’ensemble des faits et compte tenu de l’incohérence sur la décision d’interdiction de séjour, est invité à saisir le juge d’application des peines pour régulariser la situation.
Une énième affaire de violences conjugales, qui met en exergue une fois de plus la misère sociale de nombre de familles … un sujet dans le collimateur de la justice

Ann Bouard