Le tribunal de Saint-Martin veut envoyer un signal fort aux trafiquants de drogue
Un jeune homme était jugé jeudi dernier en comparution immédiate au tribunal de Saint-Martin, après une garde à vue de 36 h pour avoir tenté de transporter de la cocaïne dans ses bagages.
Le 15 mai, les agents de sûreté de l’aéroport de Grand Case signalaient à la police de l’air et des frontières un bagage suspect, contenant une masse métallique. L’ouverture de la valise, en présence du passager, permettait la découverte de 2,4 kg de cocaïne. Le passager, un jeune métro de 29 ans, ayant vécu à Saint-Martin, sans casier judiciaire et non connu pour trafic de stupéfiant, mais cependant consommateur de cocaïne expliquait du fait de déboires financiers, avoir voulu tirer bénéfice de la revente pour éponger ses dettes. Il avait lui-même conditionné la drogue, ajoutant une plaque de métal pour masquer la marchandise.
La faute à Irma ?
Menotté et escorté par 3 gendarmes, le jeune homme est visiblement choqué et s’effondre lorsque le juge rappelle les circonstances de son arrestation et l’informe des perquisitions menées chez l’ami chez lequel il séjournait à Saint-Martin et chez sa mère en métropole.
Jeune papa d’une fillette de 5 mois, il avait quitté Saint-Martin fin septembre après que sa compagne, alors enceinte ait été évacuée 2 jours après le cyclone, laissant derrière lui son travail de serveur et son entreprise de tracking en cours de cession. C’est ce dernier point qui fait basculer sa vie.
La vente de l’entreprise, qu’il avait créée en 2012 en empruntant, devait être signée le 15 septembre ... En métropole, il emprunte à nouveau à sa famille pour revenir conclure la vente, mais une fois sur place l’acheteur se désiste. L’argent emprunté va donc servir à acheter la drogue à plusieurs revendeurs de l’île avec l’idée à son retour d’effacer ses dettes.
Le procureur réclame la « case prison »
Ce type de dossier est très rarement jugé en comparution immédiate. Le procureur rappelle qu’il y a une recrudescence de la drogue et qu’au niveau national ce ne sont pas moins de 9 tonnes de cocaïne qui ont été saisies en 2017. « La justice est donc là pour sanctionner. Le prévenu est un opportuniste, certes, mais il fait partie des gens qui alimentent le marché. Ce n’est pas un grand trafiquant, il avait des possibilités d’avenir et a choisi la facilité, il ne peut y avoir que la prison.
Il faut que cela se sache auprès des gens qui viennent ici pour cela et leur envoyer un signal car ces faits sont graves ». Il demande 3 ans d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis simple ou avec mise à l’épreuve et obligation de soins, laissant le tribunal se prononcer sur ce point, un mandat de dépôt, une interdiction de séjour de 5 ans sur l’île et la confiscation des scellés (espèces détenues par le prévenu).
La défense demande à la justice d’adapter la peine
Saisie par le père du prévenu, désespéré que son fils ait pu se livrer à une activité criminelle, Maître Lacassagne a mis ses tripes dans la défense rappelant que le jeune homme n’a jamais eu de déboire avec la justice, qu’il travaille depuis l’age de 15 ans, qu’il a une famille prête à le soutenir, qu’il ne consommait plus de drogue depuis son retour en France, et qu’il avait des possibilité d’avenir.
« C’est l’appât du gain qui l’a poussé à s’engager dans une voie illégale, mais ce n’est pas un trafiquant, juste un primo-délinquant qui a voulu rembourser ses dettes, c’est une erreur de jeunesse ! ». Son incarcération en Guadeloupe ne semble pas être la bonne solution, sachant que son père s’engage à l’héberger, qu’il a une promesse d’embauche en métropole et qu’il a de graves problèmes de santé, pour lesquels il devait être suivi dès cet été par un neurochirurgien.
Au vue de sa personnalité, il ne devrait pas subir les affres de la prison et être confronté à des détenus aguerris. En conclusion l’avocate souscrit à l’interdiction de territoire, mais demande une peine avec sursis avec une mise à l’épreuve avec obligation de soins, au besoin avec un bracelet électronique. A l’issue des délibérations, le tribunal juge ce trafic inadmissible et décide de ne pas tenir compte des circonstances atténuantes et de suivre les réquisitions du procureur.
Le juge condamne le jeune homme à 3 ans de prison, dont 18 mois avec sursis et mise à l’épreuve avec obligations de soins et à 5 ans d’interdiction de séjour à St Martin et St Barth, se prononce sur la restitution des scellées (300 € et 160$) et délivre un mandat de dépôt … le prévenu est donc transféré à Basse Terre pour effectuer sa peine.