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Conférence de Coopération Régionale des Antilles-Guyane : en faveur de l’intégration géopolitique

Par Ann Bouard
29 April 2024

Plus qu’une grand-messe des exécutifs des différentes Collectivités françaises, la Conférence de Coopération Régionale des Antilles-Guyane permet chaque année d’avancer sur des dossiers de coopération importants pour la stabilité, l’économie, et l’avenir d’une région qui compte 250 millions d’habitants répartis sur 38 pays. Retour sur cette 17e édition qui n’a pas fait exception à la règle.

Accueillie pour la première fois à Saint- Martin, une collectivité qui vit au quotidien le défi de la coopération avec son voisin Sint Maarten, la CCRAG a été officiellement ouverte par Louis Mussington mardi dernier.

Du 23 au 25 avril, les présidents des Collectivités françaises, les préfets et ambassadeurs français en poste dans la région, les principales organisations de coopération de la Caraïbe (AEC, OECO, CARICOM) et les représentants de la Commission européenne ont mené leurs travaux selon quatre grands axes.

La première journée a été consacrée aux enjeux géopolitiques de la grande Caraïbe et l’intégration régionale des Collectivités françaises des Amériques, et à la sécurité, tant au niveau des risques naturels, environnementaux ou sanitaires que de la criminalité et des trafics. Le second jour, ce sont les exportations et les échanges commerciaux ainsi que les échanges culturels, linguistiques et la promotion de la francophonie qui étaient au coeur des débats.

DES SPÉCIFICITÉS DIFFÉRENTES, MAIS DES PRÉOCCUPATIONS COMMUNES

Cette conférence met aussi en exergue les particularités de chaque Collectivité. Gabriel Serville, président de la Collectivité territoriale de Guyane, en a fait la démonstration. Son territoire, capable de capter le carbone ou d’envoyer un télescope pour explorer l’univers, compte paradoxalement 54% de sa population en dessous du seuil de pauvreté.

Dans les préoccupations communes, la circulation des armes et de la drogue, de plus en plus importante, mais aussi les règles des compagnies aériennes et maritimes qui font la pluie et le beau temps et mettent en péril la continuité territoriale, comme l’a souligné Gabriel Serville. Il en appelle à la ministre déléguée à l’outre-mer, de casser cette dynamique qui n’est pas du tout favorable aux territoires ultramarins, et qui contribue à les étrangler.

Autre questionnement des collectivités, le cadre statutaire. Elles sont unanimes pour déplorer que chaque décision doive en référer à Paris empêchant les partenariats, même informels, avec les îles ou états avoisinants.

Pour Serge Letchimy, président de la Collectivité territoriale de Martinique, «c’est une infantilisation, car aucun président de Collectivité ne peut signer un accord international. C’est l’esprit du peuple qui doit s’exprimer avant tout, et être traduit par les administrateurs, et non pas l’inverse ».

RETOUR DE LA FRANCE DANS LA BANQUE DÉVELOPPEMENT DES CARAÏBES

Outre la signature de la déclaration de politique conjointe sur l’action extérieure de l’État et des Collectivités françaises dans le bassin caraïbéen (voir notre édition du 23 avril), on retiendra de cette conférence plusieurs points. Depuis la conférence de 2019, la région poursuit avec le soutien de l’état son lobbying afin de faire de la lutte contre les sargasses une cause internationale ; un sujet qui devrait être à l’ordre du jour de la prochaine conférence des Nations Unies sur l’océan en 2025. Le retour de la France à la Banque de Développement des Caraïbes (BDC) a été vu d’un bon oeil par toutes les Collectivités. Membre de l’organisation depuis 1984, elle en avait retiré son capital en 2000. Son retour fait partie des mesures adoptées par le CIOM. Une fois ratifiée, cette décision permettra de développer une ingénierie financière puissante avec les pays voisins. L’adhésion à cette instance multilatérale a notamment vocation à accroître et renforcer l’influence diplomatique de la France en participant aux décisions stratégiques de la Banque.

La conférence s’est achevée jeudi en fin d’aprèsmidi avec la conclusion de Roland Dubertrand, ambassadeur chargé de la coopération régionale et l’allocution du Préfet Vincent Berton qui a salué la qualité des échanges, francs et directs, mais aussi concrets avec la signature d’accords et la prise d’engagements fermes. La prochaine CCRAG aura lieu en 2025 en Martinique. 

Ann Bouard