«Génocide animal» dans le nord de l’île

Les premiers cris d’alarme ont été lancés jeudi en début de soirée. Comme à leur habitude, en fin de journée, des propriétaires de chiens sortent leur compagnon pour leur promenade quotidienne. Certains en laisse, d’autres, dressés pour ce faire, laissés libres, aux côtés de leur maître. Son remarquable flair aidant, le chien est attiré par l’appétence des odeurs que diffuse le poisson dans lequel est introduit le poison mortel. L’animal le trouve, l’ingère et entre 5 et 20 minutes plus tard, en fonction de la quantité ingérée et du poids de l’animal, la mort arrive dans d’atroces souffrances, l’animal convulsant et se tordant de douleur. C’est la fin.

 

 

Un même scénario qui s’est reproduit un très grand nombre de fois, entre jeudi et dimanche. Dans la nuit de jeudi à vendredi, la clinique vétérinaire de Concordia, qui n’était pourtant pas de garde cette nuit-là, a répondu présente et les docteurs vétérinaires se sont démenés sur tous les fronts pour tenter de sauver les chiens qui pouvaient encore l’être. Mais presque cause perdue, tant le poison est fort et mortel. Vendredi 17 septembre au matin, les docteurs vétérinaires de la clinique de Concordia nous confiaient avoir reçu durant cette triste nuit quinze chiens. Treize sont décédés, seuls deux étaient toujours sous leur surveillance, sous perfusions, entre la vie et la mort. Beaucoup d’autres n’ont pas eu le temps d’arriver jusqu’à la clinique, ils sont morts sur le chemin. Et dans la journée et la nuit de vendredi puis de samedi, le défilé de maîtres de chiens en détresse n’a pas cessé dans cette même clinique. En fin de journée de samedi, une cinquantaine de chiens de propriétaires étaient recensés décédés. Un nombre qui ne compte pas le nombre certainement encore plus important de chiens errants, mais aussi de chats, d’iguanes, d’insectes et d’autres animaux. Un véritable crime animalier.

 

 

Dès vendredi matin, les propriétaires des chiens décédés se succédaient à la brigade de gendarmerie de Hope Estate pour déposer plainte. Des dépôts de plainte en nombre, une dizaine selon les forces de l’ordre, qui ont fait prendre au sérieux l’affaire par le lieutenant colonel Wintzer, commandant de la gendarmerie de Saint-Martin qui confirmait vendredi matin avoir constaté «un grand nombre de décès de chiens, 13 au total, dont 12 de propriétaires et 1 chien errant, vraisemblablement par empoisonnement» et indiquait avoir ouvert une enquête pour déterminer l’origine de ces décès. Sur les réseaux sociaux, ce sont près d’une cinquantaine de chiens de propriétaires et de chiens errants qui auraient perdu la vie. Les différentes associations de défense de la cause animale, I Love My Island Dog et Soualiga Animal Lovers en tête, insistaient auprès de tous les propriétaires d’animaux victimes, de la nécessité d’aller porter plainte à la gendarmerie, seule condition pour qu’une enquête de poids soit menée et que le parquet s’en saisisse également sérieusement. La gendarmerie incitait également ceux qui auraient constaté des décès ou auraient été témoins de quelque chose de venir témoigner auprès de ses services.

 

 

Camille Verdier et Elise Rivière, toutes deux victimes de la perte de leurs compagnons à quatre pattes, cinq à elles deux, créent dès le vendredi le Collectif «Balance ton tueur d’animaux SXM» qui comptait dès les premières heures plus d’une centaine de membres et en compte aujourd’hui près de 400. Une réunion était organisée samedi en fin d’après-midi dans le snack/bar de Cénélia à Cul de Sac, afin de mettre en œuvre un plan d’action dans les meilleurs délais. Une rencontre où l’émotion et la colère étaient omniprésentes. Outre rendre hommage à leurs compagnons décédés, le Collectif entend obtenir dans les plus brefs délais des audiences auprès du préfet, du président de la Collectivité et de la direction des services vétérinaires.

 

 

Les membres de «Balance ton tueur d’animaux SXM» veulent pointer du doigt les responsabilités des autorités locales dans ce qu’ils considèrent un génocide orchestré. «La sécurité publique est mise à mal. Les animaux domestiques sont protégés par des lois et nous comptons bien les faire valoir. Par ailleurs, les enfants et une partie de la faune sont aussi en danger face à de tels agissements. Nous voulons des réponses fermes du préfet quant aux actions qu’il va mener pour assurer la sécurité des animaux, en dehors de l’enquête de gendarmerie. Et nous attendons également des réponses fermes de la part de la Collectivité dont la responsabilité est également grandement latente, face à son inertie quant à une véritable politique publique mise en œuvre envers la cause animale. Il n’y a toujours pas de fourrière alors que c’est une obligation légale sur le territoire. Des associations se démènent depuis l’ouragan Irma pour pouvoir créer un refuge, mais la Collectivité montre clairement que cela ne fait pas partie de ses priorités. Le défaut de fourrière et de refuge engendre une augmentation exponentielle des chiens errants, ce qui provoque la colère chez certains … La Collectivité devrait mener des campagnes de stérilisation des animaux errants, mais face à sa défaillance, ce sont les associations qui récupèrent des fonds privés pour le faire. Ceci expliquant cela, nous en arrivons à ces situations extrêmes», confiait Camille du collectif. Dès lundi matin, le Collectif a pris contact avec les autorités d’Etat et celles de la Collectivité pour obtenir ces rendez-vous en urgence. «Il faut que ces décès de nos compagnons à quatre pattes ne restent pas dans l’indifférence générale et qu’ils servent à faire avancer la cause animale sur l’île», concluait Camille. Les autorités ont répondu aux sollicitations du collectif et des rendez-vous ont été actés pour la journée de jeudi. Une affaire à suivre de près.

 

Le Collectif «Balance ton tueur d’animaux SXM» a souhaité rendre hommage à quelques animaux décédés par empoisonnement ainsi qu’aux heureux rescapés par la publication de cette galerie photos :