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«We are here, because they were there» : une soirée à la mémoire des poilus de Saint-Martin

Par Ann Bouard
22 July 2022
Une soirée consacrée à la mémoire, celles des poilus de Saint-Martin, avec notamment Serge Gumbs, auteur du livre « Les Poilus de Saint-Martin » et un focus particulier sur Frédéric Jackson et la bataille de Verdun s’est tenue lundi soir à Quartier d’Orléans. Organisée par la famille Arnell, ce retour dans le temps était très instructif sur l’histoire de Saint-Martin et sur l’implication de sa population lors de la première guerre mondiale, celle que l’on appelle toujours la Grande Guerre.
C’est le Pasteur qui a mis gracieusement à disposition sa salle paroissiale près de l’église Solid Rock Assembly, car presque cinq ans après Irma, il n’y a toujours pas de lieu à Quartier d’Orléans où se réunir, ce que l’on ne peut que regretter. Malgré tout la soirée a fait le plein, avec pour point de départ, le livre de Serge Gumbs, Les Poilus de Saint-Martin (toujours en vente à la Librairie des Iles et à la librairie du bord de mer), qui a le pouvoir de susciter des réactions émotionnelles vives chez les habitants de l’île dont certains ont découvert un pan, jusqu’alors méconnu, de leur propre histoire familiale. La soirée était un vibrant hommage à leurs histoires dans l’histoire, et joliment ponctuée par les notes du violoncelliste Clément Arnell sur les plus grands standards du classique, particulièrement adaptés à la circonstance.
 
Jacques Jackson et tous les autres
 
«We speak your name» : la liste des Poilus de chaque quartier de l’île a été énoncée avec une résonnance particulière pour l’assistance car les noms des Poilus, qu’ils soient de Quartier d’Orléans, de Cul de Sac, de Grand Case, de Rambaud, de Colombier, de Marigot, évoquent les familles saint-martinoises bien connues aujourd’hui. Guillaume Arnell, l’ancien sénateur de Saint-Martin est le petit-fils de l’un d’entre eux, Frédéric J. Jackson, né le 6 janvier 1882. C’est son frère, Achille qui, avec un petit cours d’histoire sur la configuration de la France, a retracé l’histoire de ce grand-père Poilu, parti sur le bateau «le Pérou» et débarqué au Havre pour défendre la patrie. Il a participé à la bataille de Verdun, ce qui lui a valu d’être amputé d’un orteil car son pied avait gelé. Pour la petite histoire, le père de F. Jackson décide d’épouser sa mère et de reconnaitre son enfant alors déjà adulte. Frédéric Jacques Jackson, devint alors Frédéric Cocks. Il est mort en 1976 à Saint-Martin à l’âge de 94 ans. Les livrets militaires des Poilus de Saint-Martin sont détenus aux archives départementales de la Guadeloupe et sont consultables, en libre accès, sur le site archivesguadeloupe.fr.
 
Les petits artistes de la mémoire
 
Les Petits artistes de la mémoire est un concours national organisé par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Il a pour objectif de préserver et de transmettre aux plus jeunes la mémoire des combattants de la Grande Guerre. Cette année, les élèves de la classe de CM2 de l’école Omer Arrondel ont choisi, parmi les 136 poilus de Saint-Martin, de réaliser le carnet de Jean Viotty, mort dans les tranchées à l’âge de 23 ans dans la nuit du 10 au 11 août 1918. Ils ont effectué leurs propres recherches et reçu le président des anciens combattants de Saint-Martin pour mener à bien leur travail.
 
Un appel à Louis Mussington
 
La soirée était l’occasion également pour l’ex-sénateur Arnell d’adresser un message à la nouvelle mandature afin que soit érigé un vrai monument aux morts, digne de ce nom, qui reconnaisse la contribution des saint-martinois à la nation. L’article L488 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, indique d’ailleurs que l'inscription du nom des défunts, morts pour la France, sur le monument aux morts de leur commune de naissance est obligatoire. Ce monument aux morts, inexistant à Saint-Martin, permettrait par ailleurs de rectifier les erreurs. Sur l’actuelle plaque, la même personne figure deux fois, sous deux noms différents, une inscription due sans doute à la difficulté de déchiffrer les pleins et les déliés de l’époque, et révélée par les recherches effectuées par Serge Gumbs.
L’assistance fut captivée de bout en bout et fière, à postériori, des exploits et surtout du courage de leurs aïeux, qui ont défendu une France pourtant si lointaine et si peu reconnaissante si l’on en juge par les programmes d’histoire enseignés jusqu’à il n’y a pas si longtemps. La présentation s’est conclue sur l’hymne de Saint-Martin, « O sweet Saint-Martin Land », repris en cœur, et dont on retiendra une phrase « my sweet paradise ».
Ann Bouard